Il y a près de quatre siècles, la religion musulmane s’est exportée en Amérique grâce aux esclaves africains.Si certains ont renié leur foi sous le coup de « la torture» d’autres ont néanmoins réussi à faire prévaloir leur « identité socio-religieuse ».Parlant des Africains venus au Brésil à partir du 16ème siècle et jusque vers le milieu du 19ème, Freyre affirme : « La vérité c’est qu’on a importé au Brésil de l’aire la plus pénétrée par l’Islam en Afrique subsaharienne, des Noirs mahométans (adeptes de la religion du prophète Mohamed, ndlr) supérieurs non seulement à nos indigènes, mais encore à la plus grande majorité des colons blancs ».
Sur les près de quinze millions
d’Africains faits esclaves en Amérique, un quart pouvait se réclamer de
l’islam. Vendus aux marchands européens comme captifs de guerre, ces
esclaves, qui généralement savaient lire et écrire, se battre et
cultiver la terre, étaient l’objet de bien des fascinations.
Bilali Muhammad |
La tête de file de cette communauté de musulmans déportés est sans doute
Omar Ibn Saïd (1770-1863) auteur de 14 manuscrits rédigés en langue
arabe. Érudit capturé à 37 ans au Sénégal puis vendu en Caroline du Sud,
il a donné à la postérité une célèbre autobiographie écrite en 1831.
Une mosquée en Caroline du Nord porte son nom, depuis 1991.
Parmi eux, un homme hors du commun : Bilali Muhammad.
Peul originaire du Futaa Jallon, en Guinée actuelle, il est capturé et
déporté aux Bahamas à l’adolescence, où il restera dix ans avant d’être
vendu à un député américain, Thomas Spalding, qui l’assigne en 1803 à sa
plantation de coton sur l’île de Sapelo, au large des côtes de la
Géorgie. Bien qu’esclave, l’homme se fait vite remarquer par ses
compétences : issu d’une famille lettrée, il est nommé superviseur et
administrateur, une position qui lui permet d’alléger les souffrances de
ses coreligionnaires, d’autant que Spalding est un propriétaire
relativement “libéral” pour l’époque, au regard des horreurs que
subissent alors les esclaves du Sud américain.(desdomesetdesminarets).
Ainsi des révoltes de Bahia au Brésil ou
le cas de l’Amistad, ce négrier espagnol repris par les captifs
eux-mêmes après une mutinerie. Échouant au large de New York, en 1839 de
l’ère chrétienne, les mutins, musulmans pour beaucoup, furent tous
placés en détention et au centre d’un procès resté fameux, avant d’être
libérés.(Sarazzins).
La réduction d’un musulman libre à la condition servile n’était point
admise par l’Islam. Or de nombreux africains réduits à l’esclavage par
les Portugais au XVe siècle appartenaient à des ethnies déjà
islamisées, de sorte que les “jolofes” et les “mandingas” n’étaient pas
rares à Séville où ils faisaient montre de leur insoumission.Cette même
résistance se manifesta d’une façon plus violente dans le Nouveau Monde
où les conditions de l’esclavage empirèrent. Dès les débuts du XVIe
siècle les “jolofes” suscitèrent de graves soulèvements qui menaçaient
l’existence de la société coloniale naissante. D’où les interdictions
formulées par les cédules royales de transférer outre-mer des esclaves
musulmans, quelle que fût leur origine. Mais la traite rendait difficile
l’application de ces textes, et, avec le temps, le comportement rétif
du “mandinga” fut considéré comme une manifestation diabolique, vision
que recueillit la tradition littéraire.(Openedition).
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